Sous le couvert de la spiritualité, Amadou Ba prépare-t-il son retour en force ? Réputé discret, l’ancien Premier ministre ne cache plus ses intentions. Le candidat fortement contesté et malheureux de Benno bokk yakaar (BBY) à la dernière présidentielle fait le tour des foyers religieux en quête de bénédictions et de pouvoir. En tout cas, derrière les sourires et les salutations, il est en train de tisser un réseau de soutien des marabouts pour ses ambitions futures.
L’agenda caché d’Amadou Ba est bien connu de tous. Il cherche à se positionner pour la prochaine élection présidentielle, potentiellement en 2029, et bien avant cela, d’autres échéances électorales comme les législatives et les locales prochaines.
Au-delà des religieux, il nous revient qu’Amadou Ba entreprend également, mais dans la plus grande discrétion, une tournée auprès de certains cadres politiques dont il espère le soutien. À ceux qu’il rencontre, il assure sa volonté de « continuer » et évoque la possibilité de créer son propre mouvement, voire son parti. C’est ainsi qu’il a pris attache avec certains ténors de Benno, dont Moustapha Niasse de l’Alliance des forces de progrès (Afp), et Aminata Mbengue Ndiaye, la présidente par intérim du Parti socialiste (Ps) à laquelle il a rendu visite après le décès de son frère, Gaston Mbengue, célèbre promoteur de lutte.
Amadou Ba rencontre également certains responsables de l’opposition, qui se sont cassés les dents lors de la présidentielle de mars. « Il est en train de former un bloc derrière lui et de coudre son boubou de chef de l’opposition, glissait à « Jeune Afrique », Oumar Sow un ancien conseiller de Macky Sall. Une manière pour lui, de snober l’ancien président et de tracer son propre chemin.
Aujourd’hui, il a su coopter d’anciens ministres de la République tels que Cheikh Oumar Hann, Doudou Ka, Lat Diop, mais aussi Aliou Sall, ancien maire de Guédiawaye et frère de l’ex-chef de l’Etat.
Le fossé davantage creusé entre Amadou Ba et Macky Sall
Ce n’est plus un secret de polichinelle, l’ancien ministre des Finances est devenu si loin de son mentor, Macky Sall. Rappelons-nous, ce dernier, qui séjourne au Maroc depuis sa chute du pouvoir avait tenu à préciser qu’il restait à la tête de son parti, coupant ainsi l’herbe sous les pieds d’Amadou Ba, devenu chef de l’opposition. En effet, aussitôt après sa défaite à la présidentielle du 24 mars, l’ancien Premier ministre a certes pris soin de remercier, par téléphone ou en personne, ceux qui ont pris le risque de le soutenir et d’aller battre campagne à ses côtés, en dépit des dissensions avec Macky Sall. Mais Amadou Ba a par la suite subi le contrecoup du fiasco.
Très vite, il s’est renfermé sur lui-même, a coupé son téléphone, pris ses distances avec l’APR. Il s’est aussi rendu à La Mecque pour certainement s’y ressourcer.
Depuis l’Arabie saoudite, Amadou Ba se fend le 2 avril d’un message sur X pour renouveler ses vœux « les plus sincères » au nouveau président tout juste investi, Bassirou Diomaye Faye, et bénir le Sénégal. Deux mois plus tard, à part les bénédictions de rigueur à l’occasion des fêtes religieuses et quelques messages de condoléances, il ne s’est quasiment plus exprimé publiquement.
Après La Mecque et un passage par Dubaï, dont on sait pour l’instant peu de choses, Amadou Ba a passé plusieurs semaines à Paris, où il a croisé la route de l’incontournable Robert Bourgi. « J’ai vu un homme meurtri par l’échec. Je lui ai dit, il faudrait que tu te ressaisisses, Amadou », confiera l’avocat français au micro du journaliste Alassane Samba Diop sur Emedia.
Aujourd’hui, le contexte politique reste incertain pour lui, et l’avenir d’Amadou Ba dépendra surtout de l’évolution des rapports de force au sein de l’Apr, de la gestion de son héritage politique, et de la capacité à regagner la confiance des électeurs. Une chose est sûre, sa renaissance politique, si elle devait avoir lieu, nécessitera un travail de longue haleine, une réinvention stratégique, et une vision claire pour l’avenir du Sénégal.