Dossier Arcelor Mittal: Aly Ngouille Ndiaye et Birima Mangara devant le doyen des juges
Le doyen des juges procède à ses premières convocations dans l’affaire dite Arcelor Mittal. L’ancien ministre de l’Industrie et des Mines, Aly Ngouille Ndiaye, sera interrogé ce mercredi à 10 heures, en tant que témoin.
« Le juge a besoin de son témoignage et va répondre à toutes ses questions », confie un de ses proches, au journal Libération, confirmant l’audition. Des sources autorisées indiquent par ailleurs que le magistrat instructeur a également convoqué, toujours comme témoin, l’ancien ministre du Budget, Birima Mangara.
D’après le quotidien d’information, une information judiciaire avait été ouverte par le parquet de Dakar pour « association de malfaiteurs, corruption, recel, blanchiment de capitaux, escroquerie et complicité » dans le cadre de cette affaire.
Suivant une plainte avec constitution de partie civile déposée par l’État du Sénégal, la procédure vise nommément Arcelor Mittal Holdings AG (anciennement dénommée Mittal Steel Holdings AG), Arcelor Mittal, Arcelor Mittal Limited, Arcelor Mittal Holland Il BV, Arcelor Mittal Mining Sénégal SA et Arcelor Mittal Infrastructures Sénégal SA. Au cœur de la procédure, déclenchée par une plainte de l’agent judiciaire de l’État, figure l’accord transactionnel conclu le 30 mai 2014 entre l’État du Sénégal et Arcelor Mittal.
Pour rappel, dans une sentence partielle rendue le 3 septembre 2013, la Chambre de Commerce Internationale (CCI) avait constaté qu’Arcelor Mittal avait commis de graves manquements. En plus de casser l’accord, elle avait renvoyé la procédure à une phase ultérieure qui devait porter sur la responsabilité et les réparations éventuelles qui pourraient être dues par Arcelor Mittal à l’État. Mieux encore, la Chambre avait ordonné l’exécution provisoire de la sentence. L’État demandait qu’Arcelor Mittal soit condamné à lui payer 3 300 milliards de FCFA et, à titre subsidiaire, environ 1 600 milliards de FCFA.
Mais, contre toute attente, le 4 juin 2014, le cabinet américain « Cleary Gottlieb Steen & Hamilton », qui représentait Arcelor Mittal, a informé le tribunal arbitral que son client avait signé un accord transactionnel avec l’État du Sénégal, ce qui mettait fin à la procédure. Pourtant, les avocats de l’État, à savoir Mes Ras Seck Bourgi et Sébastien Bonnard, avaient pris connaissance le même jour de cet accord et de l’entrée en scène d’un nouvel avocat. « Nous n’avons, en aucun cas et sous quelque forme que ce soit, été impliqués dans la négociation ni dans la signature de l’accord transactionnel mettant fin au litige opposant les deux parties », avaient-ils écrit dans un courriel versé au dossier.
150 millions de dollars virés par Arcelor Mittal dans deux sous-comptes Carpa de l’avocat français Me François Meyer, logés à la BNP Paribas, sont au cœur de l’instruction. Le tribunal arbitral était même allé jusqu’à demander, après le refus des deux avocats, que le retrait de la procédure soit confirmé par l’agent judiciaire de l’État. Ce qui n’a jamais été le cas, puisque c’est finalement le ministre délégué au Budget de l’époque, Birima Mangara, qui a saisi le tribunal arbitral dans ce sens, à la date du 30 mai 2014.
Dans l’accord transactionnel en question, l’État avait renoncé à la procédure contre le versement d’un montant de 140 millions de dollars et d’un autre de 10 millions de dollars. En-dehors de la modicité de ces sommes par rapport à celles évaluées, l’argent a été viré par Arcelor Mittal dans deux comptes Carpa dont l’avocat français Me François Meyer était titulaire. Il s’agit du fameux avocat qui avait fait son entrée dans le dossier au dernier moment. Le fait que les deux avocats, à l’origine de la procédure, aient été écartés, tout comme l’agent judiciaire de l’État, laisse penser à des transactions occultes, d’après la plainte obtenue par « Libération ». Mieux encore, dans sa plainte, l’État doute fort que les 150 millions de dollars, versés dans les deux sous-comptes Carpa de Meyer à la BNP Paribas, aient atterri dans les comptes du Trésor sénégalais.